Théâtre National de Bretagne
Direction Arthur Nauzyciel

CINÉMA

RÉTROSPECTIVE IDA LUPINO

EN 6 FILMS

Rétrospective

Le Cinéma du TNB vous propose de (re)découvrir 6 films de l'actrice, scénariste, productrice et réalisatrice : Ida Lupino.

« La longévité et la variété de la carrière d’Ida Lupino, qui s’étend de 1931 à 1978, ouvrent sur Hollywood une fenêtre particulière et éloquente. Son histoire révèle tout autant la vie d’une femme émancipée qui a traversé le vingtième siècle que celle d’une artiste qui a su évoluer, d’actrice à scénariste, productrice et réalisatrice, dans un milieu réservé à l’expression masculine. D’origine anglaise, Ida Lupino fait partie de cette vague d’actrices étrangères qui sont arrivées à Hollywood au début des années 1930 alors que le cinéma parlant réclame de nouvelles stars et privilégie celles qui viennent du théâtre. Elle participe, parmi les jeunes starlettes hollywoodiennes, à la danse des castings dans des films mineurs. Elle parvient à s’y faire un nom et une image de premier rôle d’ingenue with a dark intensity pour comédies romantiques dont elle cherche très vite à se défaire au bénéfice de l’intensité, tout comme elle s’est défait de sa chevelure platine en optant pour le brun foncé.

Dans les années 1940, sous contrat avec la Warner, elle refuse des rôles au risque de la suspension et, se surnommant « la Bette Davis du pauvre », choisit des rôles de série B, des femmes solitaires, éprouvées et éprouvant la vie dans des milieux d’hommes. Son contrat l’autorisant à travailler à la radio, elle y fait, quand elle est suspendue, ses débuts (dans Charles Boyer Show et Lux Theatre de De Mille). Autre début, elle monte en 1949 avec son deuxième mari, le scénariste Collier Young, la société de production, The Filmakers, consciente d’être dans une « nouvelle vague » et de répondre à la nécessité « de faire plus d’expérimentation avec des sujets qui sortent des conventions ». Elle analyse et s’adapte aux mutations des studios et de la société américaine en utilisant le savoir hollywoodien qu’elle a déjà acquis par son expérience, rappelant en ceci l’actrice Kinuyo Tanaka devenue réalisatrice au Japon au tournant des années 1950. Bien qu’officiant dans les Filmakers à plusieurs titres, scénariste, actrice, réalisatrice et productrice, elle est toujours actrice pour d’autres sociétés (elle accepte 4 rôles). L’aventure dure 5 années, les plus belles de sa vie, dit Ida Lupino, la structure était familiale et reposait sur l’échange d’idées. Elle a pris fin lorsque, malgré son avis, la société a voulu distribuer elle-même les films.

Après les Filmakers, en 1955, elle parvient à poursuivre sa double carrière de réalisatrice et d’actrice en rejoignant l’image télévisuelle alors en plein développement. Du même avis que son personnage désillusionné sur Hollywood dans Le Grand couteau de Robert Aldrich en 1955, elle choisit de renoncer en partie au monde trop exigeant et peut-être trop peu gratifiant du cinéma pour rester auprès de sa famille. Elle décide de se consacrer à la production et à la réalisation de séries télévisées : elle crée avec son troisième mari Howard Duff sa propre société baptisée cette fois du nom de leur fille Bridget Productions.

De la fin des années 1950 au début des années 1970, elle est ainsi créditée comme réalisatrice pour 50 programmations télévisuelles, en opérant un ultime retour à la réalisation cinématographique pour un film qui détonne, Dortoir des anges (1966), une comédie sur une communauté féminine dans une pension religieuse. C’est comme actrice, cependant, qu’Ida Lupino prolonge vraiment sa carrière au cinéma. Elle fait un retour remarqué en 1972 en Elvira Bonner dans Junior Bonner de Sam Peckinpah. Elle sait jouer également de son image hollywoodienne dans des films d’horreur. La Pluie du Diable (Robert Fuest, 1975), primé au Festival Parisien du Fantastique, lui fait gagner l’Award de la « Best Supporting Actress » et participer de cette façon, encore une fois, à la résistance des femmes – dont Bette Davis – face à la cruauté du système, en exploitant à leur profit une certaine tendance du cinéma américain à recycler durant les années 1970 ses actrices des années 1930. »

— Yola Le Caïnec, enseignante à Rennes au lycée Chateaubriand et chercheuse associée au laboratoire Études cinématographiques de l'Université Rennes 2

AU PROGRAMME


NEVER FEAR - 1949 / 1h21

THE HITCH HIKER - 1953 / 1h11

NOT WANTED - 1949 / 1h31

THE BIGAMIST - 1953 / 1h23

OUTRAGE - 1950 / 1h15

LE VAISSEAU FANTÔME - 1941 / 1h40