À l’image du projet artistique du TNB, l’École du TNB développe un projet pédagogique résolument ouvert sur l’international : invitations d’artistes-pédagogues étrangers, échanges internationaux à l’occasion de workshops… mais aussi séjours individuels à l’étranger en 3e année de formation. 

Cette semaine, suivez Zaïna à New York, au Target Margin Theater.

| Peux-tu nous présenter la structure dans laquelle tu es et ce que tu y fais ?

Target Margin Theater, une compagnie new-yorkaise basée à Brooklyn, dans un immense hangar qu'ils ont acheté, rénové et peint en jaune vif. Aujourd’hui, c’est leur lieu, leur petit sanctuaire, où ils donnent vie à de nouveaux mondes. Une bande de marginaux qui tente de toucher la cible, la target. Avec eux, je participe à la création de leur prochaine pièce, Remember This Trick, qui explore les histoires d'immigrants juifs aux États-Unis, celle de Werner Reich, un survivant d’Auschwitz, qui a appris un tour de magie qui lui a sauvé la vie, ainsi que la transmission du conte du Livre d’Esther. Chaque soir, je serai sur scène avec eux, comme une petite souris, écoutant les acteurs se remémorer leurs histoires. Ce sont un peu mes premiers pas sur la scène new-yorkaise.

| Pourquoi avoir choisi cette destination ?

Dans le dossier pour entrer au TNB, l'une des questions qui nous a été posées était : Quel voyage rêvez-vous de faire ? Je vais juste vous copier-coller ma réponse. « NEW YORK CITY BABY !!!! Pour tous les films de Scorsese, les sons de Biggie, et les comédies musicales qui ont bercé ma jeunesse, je voulais traverser le pont de Brooklyn, admirer la ville depuis l'Empire State Building et prendre un petit-déjeuner chez Tiffany’s. Je voulais me perdre dans les rues, dans ces décors de films. »

| Ton expérience change-t-elle ton point de vue sur l'écosystème culturel français ?

Ça fait un mois que je suis là... et ce que je peux vous dire c’est que, ici, le théâtre ne bénéficie d'aucune subvention, il n'y a pas d'intermittence, pas d'aide. Choisir d’être un artiste ici est un véritable acte de nécessité, de courage et d'amour pour l’art et pour ce que l’art apporte. Choisir cette voie ne devrait pas être aussi difficile. Nous avons un privilège en France. Il ne faut pas le prendre pour acquis et il faut se battre pour le garder.

| Qu'est-ce que cette expérience t'apporte en tant qu'artiste ?

« You have to crown yourself ». C'est une phrase que quelqu'un m'a dite quand je suis arrivée. « Prends cette couronne et pose-la sur ta tête ». Si tu veux entreprendre quelque chose, fais-le. Le temps est compté, n'attends pas d'être prêt·e.

| Un moment marquant depuis ton arrivée ?

Tenez-vous bien. Il est 19h30. Je sors de Trader Joe's avec un sac de courses dans les bras, prête à rentrer chez moi. Je m'arrête sur le trottoir, réalisant que je sais plus où j’ai mis mon téléphone. Parenthèse, si vous voulez un petit aperçu de New York, laissez-moi vous dire que dans le métro ça sent la weed et que les sirènes de police retentissent toutes les 4 secondes ici, que ce soit le matin ou le soir. Bref, alors que je cherche mon téléphone, j'entends une sirène de police, mais je ne m’inquiète pas plus que ça, sauf que cette fois-ci, elle se rapproche de moi à une vitesse inhabituelle. Puis, soudain, derrière moi, j'entends le crissement des pneus d'une voiture, suivi d'un bruit assourdissant. Une voiture, tentant d'échapper à la police, fais un drift dans la rue, monte sur le trottoir à toute vitesse, mon trottoir, percute mon bras et fais tomber mon sac de courses au sol. Juste derrière, la voiture de police prend le même chemin, poursuivant la première voiture à toute allure. Je me retrouve seule sur le trottoir, mes courses éparpillées autour de moi, à deux doigts d’avoir été victime d’une course-poursuite effrénée dans les rues de New York. Quand je vous dis que c’est comme dans un film.