Théâtre National de Bretagne
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"SALLINGER" DE LUDOVIC LAGARDE

LE MAQUILLAGE

Publié le 30/05/2023

 

Sallinger est une création de Ludovic Lagarde pour le projet Une saison à l'École, monté avec la promotion 11. Ce spectacle est à découvrir au TNB de janvier à juin 2023.

Rencontrer un personnage, une atmosphère, une vie, cela peut se faire par le texte, par le jeu, par le mouvement ou parfois…par le maquillage. Dans les premiers temps de la création de Sallinger, les acteurs et actrices ont rencontré Mytil Brimeur, maquilleuse, et se sont inventés à chacun un nouveau visage. Juste avant une représentation, Charlotte Leroy, élève de la promotion 11, s’est glissée dans les loges, et a photographié la préparation d’avant-scène, le rituel minutieux des produits cosmétiques, première étape nécessaire pour devenir quelqu’un d’autre.

 

Zaïna Yalioua
19h25 : je m’installe face au miroir dans la petite loge que je me suis fabriquée.

La rose blanche que j’avais posée à ma droite a désormais séché et ses pétales tombent.

Accrochée au miroir, une photographie de Marilyn Monroe, une carte postale du port d’Alger offerte par Eli, le petit mot de première d’Hortense, et le porte clé porte bonheur de « Sallinger ».

À côté, une petite statue dorée d’un singe qui se cache, les yeux me surveillent.

Le haut de la loge est drapé par le voile noir de Carole, tandis que l’odeur de sauge se mélange aux effluves de la laque pour cheveux.

Soundtrack de Diam’s dans les oreilles.

Carole c’est son teint pâle

C’est son noir cendre sur les yeux

C’est son rouge sang sur la bouche

C’est les cheveux en feu !!!

 

Tristan Glasel
Quand je commence à appliquer la matière sur mon visage, je sens la contagion se faire dans le reste du corps : je deviens une pâte à modeler émotive, une peinture malaxable au gré des surprises du moment présent. 

 

Hortense Girard
« Mais je vous en prie, ne me laissez pas à cet âge imbécile où il convient de se déguiser pour tenter de plaire, et où tout ce qu’il convient de faire me déplaît souverainement. » –
Sallinger de Bernard-Marie Koltès

Le personnage de Anna est un personnage blafard, comme sa famille blafarde mais elle cherche à ressembler à Carole. Elle cache dans sa robe un rouge à lèvres-sang, elle poudre le dessus des yeux. Il y a dans le rapport au maquillage quelque chose de la féminité obligatoire. Il faut d’abord maquiller le lien à la famille (le blanc), et la façon dont je peux m’extraire de cette famille, m’en détacher – de quoi appartenir et fuir en même temps.

Le visage se grime et s’embellit pour devenir monstrueux, comme l’adolescence. Quand je me maquille, je prépare les nuances, les plis du passé, ceux de l’espoir, le texte s’inscrit dedans. Le maquillage fera-t-il le travail à ma place ?

 

Stéphane Delille
Mon maquillage a été pensé et conçu par Mytil, des discussions que nous avons pu avoir, et de la compréhension qu’elle a eu du personnage. Elle voulait faire ressortir ses/mes traits, les mettre en avant, à contrario de ce qui a pu être fait pour le reste de la distribution. Souligner la place à part entière du Rouquin dans la pièce, son caractère onirique, fantasmatique.

 

Esther Lefranc
« Eh ?

Hmm ?

Tu peux me dire si j’ai mis trop de blanc ?

Oulah !

Quoi ? »

Il était un fantôme, qui patientait patiemment dans un miroir, et qui au premier coup de pinceau, s’échappa de là…

 

Eli Roy
Pour Henry, une base blanche sur le visage pour être en harmonie avec tous les autres personnages. Des cernes violettes sous les yeux pour rappeler sa vie nocturne dans les boîtes. Les cheveux sur le front et un peu gras, avec des tâches sur le crâne qui sont les trous que lui valent ses sorties en boîte. Les videurs le virent tous les soirs et lui rasent le crâne pour le reconnaître le lendemain.

« Je regarde les videurs à la porte, je cherche celui qui ne me connaît pas ou ne me reconnaît pas, je mets un chapeau pour le crâne et m’y voilà de nouveau, je n’ai jamais pu rentrer direct chez moi. »

 

Pierre Thionois
À chaque fois, je me rase. Al sent la mousse à raser. Il faut être imberbe pour apposer le blanc.

Mes camarades me disent que je fais peur. Cela veut dire que je m’améliore.

Le nez poivrot est plein de sang. Les cernes de beurre noir, qui entourent des yeux explosés de fatigue. La bouche n’est jamais pareille, le tanin s’y dépose de manière différente chaque soir.

Le maquillage d’Al est dans une artificialité revendiquée. C’est une exagération criante. Si l’on nettoyait son visage, il ne resterait qu’une surface ridée, sans yeux, ni bouche. C’est un clown qui fait rire jaune, aussi jaune que ses dents. Pendant 30 minutes, face à mon miroir, je me laisse très soigneusement envahir par les monstres.

Souvent je n’arrive pas à bien me démaquiller. Le nez reste comme écorché par le rouge. On croit que je me suis battu.

Le Magazine du TNB

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LE MAQUILLAGE

 

Sallinger est une création de Ludovic Lagarde pour le projet Une saison à l'École, monté avec la promotion 11. Ce spectacle est à découvrir au TNB de janvier à juin 2023.

"SALLINGER" DE LUDOVIC LAGARDE

LE MAQUILLAGE

Publié le 30/05/2023

 

Sallinger est une création de Ludovic Lagarde pour le projet Une saison à l'École, monté avec la promotion 11. Ce spectacle est à découvrir au TNB de janvier à juin 2023.

Rencontrer un personnage, une atmosphère, une vie, cela peut se faire par le texte, par le jeu, par le mouvement ou parfois…par le maquillage. Dans les premiers temps de la création de Sallinger, les acteurs et actrices ont rencontré Mytil Brimeur, maquilleuse, et se sont inventés à chacun un nouveau visage. Juste avant une représentation, Charlotte Leroy, élève de la promotion 11, s’est glissée dans les loges, et a photographié la préparation d’avant-scène, le rituel minutieux des produits cosmétiques, première étape nécessaire pour devenir quelqu’un d’autre.

 

Zaïna Yalioua
19h25 : je m’installe face au miroir dans la petite loge que je me suis fabriquée.

La rose blanche que j’avais posée à ma droite a désormais séché et ses pétales tombent.

Accrochée au miroir, une photographie de Marilyn Monroe, une carte postale du port d’Alger offerte par Eli, le petit mot de première d’Hortense, et le porte clé porte bonheur de « Sallinger ».

À côté, une petite statue dorée d’un singe qui se cache, les yeux me surveillent.

Le haut de la loge est drapé par le voile noir de Carole, tandis que l’odeur de sauge se mélange aux effluves de la laque pour cheveux.

Soundtrack de Diam’s dans les oreilles.

Carole c’est son teint pâle

C’est son noir cendre sur les yeux

C’est son rouge sang sur la bouche

C’est les cheveux en feu !!!

 

Tristan Glasel
Quand je commence à appliquer la matière sur mon visage, je sens la contagion se faire dans le reste du corps : je deviens une pâte à modeler émotive, une peinture malaxable au gré des surprises du moment présent. 

 

Hortense Girard
« Mais je vous en prie, ne me laissez pas à cet âge imbécile où il convient de se déguiser pour tenter de plaire, et où tout ce qu’il convient de faire me déplaît souverainement. » –
Sallinger de Bernard-Marie Koltès

Le personnage de Anna est un personnage blafard, comme sa famille blafarde mais elle cherche à ressembler à Carole. Elle cache dans sa robe un rouge à lèvres-sang, elle poudre le dessus des yeux. Il y a dans le rapport au maquillage quelque chose de la féminité obligatoire. Il faut d’abord maquiller le lien à la famille (le blanc), et la façon dont je peux m’extraire de cette famille, m’en détacher – de quoi appartenir et fuir en même temps.

Le visage se grime et s’embellit pour devenir monstrueux, comme l’adolescence. Quand je me maquille, je prépare les nuances, les plis du passé, ceux de l’espoir, le texte s’inscrit dedans. Le maquillage fera-t-il le travail à ma place ?

 

Stéphane Delille
Mon maquillage a été pensé et conçu par Mytil, des discussions que nous avons pu avoir, et de la compréhension qu’elle a eu du personnage. Elle voulait faire ressortir ses/mes traits, les mettre en avant, à contrario de ce qui a pu être fait pour le reste de la distribution. Souligner la place à part entière du Rouquin dans la pièce, son caractère onirique, fantasmatique.

 

Esther Lefranc
« Eh ?

Hmm ?

Tu peux me dire si j’ai mis trop de blanc ?

Oulah !

Quoi ? »

Il était un fantôme, qui patientait patiemment dans un miroir, et qui au premier coup de pinceau, s’échappa de là…

 

Eli Roy
Pour Henry, une base blanche sur le visage pour être en harmonie avec tous les autres personnages. Des cernes violettes sous les yeux pour rappeler sa vie nocturne dans les boîtes. Les cheveux sur le front et un peu gras, avec des tâches sur le crâne qui sont les trous que lui valent ses sorties en boîte. Les videurs le virent tous les soirs et lui rasent le crâne pour le reconnaître le lendemain.

« Je regarde les videurs à la porte, je cherche celui qui ne me connaît pas ou ne me reconnaît pas, je mets un chapeau pour le crâne et m’y voilà de nouveau, je n’ai jamais pu rentrer direct chez moi. »

 

Pierre Thionois
À chaque fois, je me rase. Al sent la mousse à raser. Il faut être imberbe pour apposer le blanc.

Mes camarades me disent que je fais peur. Cela veut dire que je m’améliore.

Le nez poivrot est plein de sang. Les cernes de beurre noir, qui entourent des yeux explosés de fatigue. La bouche n’est jamais pareille, le tanin s’y dépose de manière différente chaque soir.

Le maquillage d’Al est dans une artificialité revendiquée. C’est une exagération criante. Si l’on nettoyait son visage, il ne resterait qu’une surface ridée, sans yeux, ni bouche. C’est un clown qui fait rire jaune, aussi jaune que ses dents. Pendant 30 minutes, face à mon miroir, je me laisse très soigneusement envahir par les monstres.

Souvent je n’arrive pas à bien me démaquiller. Le nez reste comme écorché par le rouge. On croit que je me suis battu.

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