Théâtre National de Bretagne
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À PROPOS DE "AVANT LA TERREUR"

ENTRETIEN AVEC VINCENT MACAIGNE

Publié le 31/05/2023

 

Le comédien et metteur en scène Vincent Macaigne, artiste associé au TNB, est en création pour son nouveau spectacle Avant la terreur (Richard III).

Avec ce spectacle, on a l’impression que c’est le retour de Vincent Macaigne au théâtre, parallèlement à votre itinéraire au cinéma.

 

En fait je ne me suis jamais arrêté de faire du théâtre. Pendant toute la pandémie, j’ai répété des spectacles que je n’ai pas montrés et j’organise régulièrement des ateliers de travail avec des comédiens qui me servent de laboratoires d’essai pour de futures créations. Par ailleurs, je ne cherche pas à sortir un spectacle tous les ans, je crée un spectacle quand je sens qu’il y a une nécessité de le faire, que je vais mettre toutes mes forces dans ce feu d’artifice. C’est comme cela que je vois le théâtre, c’est un moment où je vais capter toute mon énergie et la donner. Je trouve très important, surtout en ce moment, de continuer à faire des spectacles qui aient une certaine ampleur aux yeux du public, il ne faut pas en avoir peur, il faut s’y lancer, sinon le spectateur va perdre l’habitude progressivement de ces rendez-vous là, des productions qui fassent événement. C’est pour cela que j’attends d’avoir une vraie envie et de la monter au mieux.

 

Parlons justement du choix de Richard III.
 

« Ce qui m’intéresse, c’est que le personnage de Richard III ne soit pas vu comme un personnage méchant mais comme une sorte d’énorme idiot. »

 

Richard III, cela m’a saisi parce que c’est une forme de continuité avec Au moins j’aurai laissé un beau cadavre (adaptation d’Hamlet) et L’Idiot. C’est comme si le même personnage avait évolué dans le mauvais sens. Parce que pour moi, à la fin de la pièce, Hamlet devient d’une certaine manière fasciste : sa réponse à la découverte de la vérité, c’est une forme de fascisme, une réponse assez brutale. Quant à L’Idiot, dans sa folie, avec sa naïveté, sa parole aussi devient assez
brutale dans ce qu’il exprime de son espoir d’unir un pays. Cette idée du pays uni, pour moi, peut s’apparenter à du fascisme. Et ce qui m’intéresse, c’est que le personnage de Richard III ne soit pas vu comme un personnage méchant mais comme une sorte d’énorme idiot, peut-être un Trump. Or, souvent Richard III a été montré en personnage égotique, qui essaie de prendre le pouvoir. Moi je vois plutôt un groupe : tous ces personnages qui font partie de « l’équipe » de Richard III, et qui finissent par s’entretuer, forment un cercle rêvant au pouvoir, avec au centre Richard III. Des personnages qui se concertent et se cautionnent : pour illustrer l’idée que la folie du pouvoir est un processus qui s’auto-valide au sein d’un cercle.

 

Est-ce qu’il y a d’autres aspects de ce projet que vous souhaiteriez aborder ?

 

Oui, pour moi, dans ce spectacle, il y a un lien très important avec l’enfance. Et à mes yeux c’est une sorte de prolongation de mes spectacles précédents qui procèdent de ce ressortlà. Dans Richard III c’est comme si on avait sali l’enfance. Pourquoi Lady Anne a un doute ? C’est parce qu’elle fait partie d’un monde qui est déjà souillé. Pourquoi la rumeur fonctionne ? C’est parce que le monde est déjà souillé. Pour moi, cela est hyper important : on ne part pas d’un monde de petites brebis avec un loup qui va les dévorer, on part d’un monde qui est complètement bloqué. Cette vision-là traverse mes pièces et elle traverse aussi quelque chose de notre époque, parce qu’avoir des enfants aujourd’hui, cela pose la question de ce qu’ils vont devenir dans un monde qui est annoncé comme une forme d’apocalypse. Quelle est cette terreur que l’on impose aux parents, et aux enfants, d’être vivants et de vieillir ? Je souhaite inclure des enfants dans la distribution du spectacle, cela est primordial à mes yeux.

 

– Propos recueillis par Tony Abdo-Hanna pour la MC93, juin 2022

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ENTRETIEN AVEC VINCENT MACAIGNE

 

Le comédien et metteur en scène Vincent Macaigne, artiste associé au TNB, est en création pour son nouveau spectacle Avant la terreur (Richard III).

À PROPOS DE "AVANT LA TERREUR"

ENTRETIEN AVEC VINCENT MACAIGNE

Publié le 31/05/2023

 

Le comédien et metteur en scène Vincent Macaigne, artiste associé au TNB, est en création pour son nouveau spectacle Avant la terreur (Richard III).

Avec ce spectacle, on a l’impression que c’est le retour de Vincent Macaigne au théâtre, parallèlement à votre itinéraire au cinéma.

 

En fait je ne me suis jamais arrêté de faire du théâtre. Pendant toute la pandémie, j’ai répété des spectacles que je n’ai pas montrés et j’organise régulièrement des ateliers de travail avec des comédiens qui me servent de laboratoires d’essai pour de futures créations. Par ailleurs, je ne cherche pas à sortir un spectacle tous les ans, je crée un spectacle quand je sens qu’il y a une nécessité de le faire, que je vais mettre toutes mes forces dans ce feu d’artifice. C’est comme cela que je vois le théâtre, c’est un moment où je vais capter toute mon énergie et la donner. Je trouve très important, surtout en ce moment, de continuer à faire des spectacles qui aient une certaine ampleur aux yeux du public, il ne faut pas en avoir peur, il faut s’y lancer, sinon le spectateur va perdre l’habitude progressivement de ces rendez-vous là, des productions qui fassent événement. C’est pour cela que j’attends d’avoir une vraie envie et de la monter au mieux.

 

Parlons justement du choix de Richard III.
 

« Ce qui m’intéresse, c’est que le personnage de Richard III ne soit pas vu comme un personnage méchant mais comme une sorte d’énorme idiot. »

 

Richard III, cela m’a saisi parce que c’est une forme de continuité avec Au moins j’aurai laissé un beau cadavre (adaptation d’Hamlet) et L’Idiot. C’est comme si le même personnage avait évolué dans le mauvais sens. Parce que pour moi, à la fin de la pièce, Hamlet devient d’une certaine manière fasciste : sa réponse à la découverte de la vérité, c’est une forme de fascisme, une réponse assez brutale. Quant à L’Idiot, dans sa folie, avec sa naïveté, sa parole aussi devient assez
brutale dans ce qu’il exprime de son espoir d’unir un pays. Cette idée du pays uni, pour moi, peut s’apparenter à du fascisme. Et ce qui m’intéresse, c’est que le personnage de Richard III ne soit pas vu comme un personnage méchant mais comme une sorte d’énorme idiot, peut-être un Trump. Or, souvent Richard III a été montré en personnage égotique, qui essaie de prendre le pouvoir. Moi je vois plutôt un groupe : tous ces personnages qui font partie de « l’équipe » de Richard III, et qui finissent par s’entretuer, forment un cercle rêvant au pouvoir, avec au centre Richard III. Des personnages qui se concertent et se cautionnent : pour illustrer l’idée que la folie du pouvoir est un processus qui s’auto-valide au sein d’un cercle.

 

Est-ce qu’il y a d’autres aspects de ce projet que vous souhaiteriez aborder ?

 

Oui, pour moi, dans ce spectacle, il y a un lien très important avec l’enfance. Et à mes yeux c’est une sorte de prolongation de mes spectacles précédents qui procèdent de ce ressortlà. Dans Richard III c’est comme si on avait sali l’enfance. Pourquoi Lady Anne a un doute ? C’est parce qu’elle fait partie d’un monde qui est déjà souillé. Pourquoi la rumeur fonctionne ? C’est parce que le monde est déjà souillé. Pour moi, cela est hyper important : on ne part pas d’un monde de petites brebis avec un loup qui va les dévorer, on part d’un monde qui est complètement bloqué. Cette vision-là traverse mes pièces et elle traverse aussi quelque chose de notre époque, parce qu’avoir des enfants aujourd’hui, cela pose la question de ce qu’ils vont devenir dans un monde qui est annoncé comme une forme d’apocalypse. Quelle est cette terreur que l’on impose aux parents, et aux enfants, d’être vivants et de vieillir ? Je souhaite inclure des enfants dans la distribution du spectacle, cela est primordial à mes yeux.

 

– Propos recueillis par Tony Abdo-Hanna pour la MC93, juin 2022