Théâtre National de Bretagne
Direction Arthur Nauzyciel

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FESTIVAL TNB X LES INROCKS

ENTRETIEN AVEC ARTHUR NAUZYCIEL

Publié le 23/10/2023

 

Entretien réalisé pour le supplément des Inrocks consacré au Festival TNB 2023, avec Arthur Nauzyciel, metteur en scène, comédien et directeur du TNB.

“J’ai commencé par vouloir être acteur”

Arthur Nauzyciel revendique un festival de transmissions en recentrant l’événement sur le travail du plateau où il prend sa part de risque en tant qu’acteur.

 

Quelles sont les ambitions de cette septième édition du Festival TNB ?

 

Arthur Nauzyciel — Garder le cap. C’est très important pour nous d’avoir dans la saison ce moment festif, qui existe depuis l’origine de la Maison de la Culture, et que j’ai lancé, depuis 2017, sous ce nouveau format. Le Festival est un rendez-vous attendu. Un temps privilégié, où les gens se retrouvent dans une énergie particulière et un temps singulier pour partager ensemble un autre rapport aux spectacles vivants. Construire ce projet avec des structures partenaires participe aussi d’une incitation au nomadisme du public à travers une offre dispersée sur l’ensemble du territoire culturel de la ville de Rennes et sa métropole.

 

Quels liens tissez-vous entre le Festival et votre programmation de la saison ?

 

On ne fait pas de différence entre les artistes présentés dans la saison et ceux invités au Festival. Pour nous, il s’agit d’un arrêt sur image qui cristallise la variété des sujets qu’on aborde au long de l’année. Comme spectateur, je pense qu’on se construit à travers la comparaison des formes et des esthétiques. On pense le Festival comme un choc d’émotions qui se réclame d’une confrontation d’univers. Les thèmes sont très divers, ils vont des arts visuels à des hommages à des figures tutélaires, tout autant qu’ils traitent de l’histoire contemporaine et de notre engagement envers le handicap. C’est parfois en découvrant des spectacles aux thématiques similaires et en s’apercevant qu’elles peuvent être traitées de manière très différente qu’on construit son regard.

 

Vous mettez l’accent sur l’idée de transmission.

 

La question de la transmission s’inscrit autant dans les sujets traités au plateau que dans le fait que le Festival soit devenu un lieu de formation à travers une série de master class, de workshops et de rencontres. Autant de propositions ouvertes au public, à de jeunes artistes français et étrangers et à des
étudiants. Il me semble important que le Festival leur permette de rencontrer les artistes en offrant la possibilité d’échanger avec eux et de les découvrir au travail.

 

Dans Grand Palais et sous la direction de Pascal Kirsch, vous interprétez le rôle du peintre Francis Bacon.

 

Pour incarner un artiste, Pascal Kirsch cherchait un interprète qui soit aussi un créateur. Il avait découvert mon travail avec La Mouette de Tchekhov que j’avais présentée au Festival d’Avignon dans la Cour d’honneur. J’aimais ses mises en scène, et traiter du sujet des rapports entre Bacon et son amant George Dyer est un pari passionnant. 

 

Les hasards de la vie vous ont déjà amené à croiser Bacon.

 

C’est un jardin secret qui remonte à mes 17 ans. J’avais profité d’un voyage à Londres pour visiter la Tate Modern. La découverte d’une exposition qui lui était alors consacrée fut un véritable choc. Avisant un petit monsieur assis sur une chaise, que je pris pour un gardien, je lui demande de nous aider dans notre visite, ce qu’il accepte avec une grande gentillesse. Le lendemain, je tombe sur une photo du peintre dans le journal et m’aperçois que c’était Francis Bacon qui nous avait servi de guide ! En travaillant sur ce projet, je me suis souvenu d’un autre moment intime lié à Francis Bacon alors que j’étais élève comédien à l’École de Chaillot d’Antoine Vitez. Lors d’un exercice sur la peinture proposé par le scénographe Yánnis Kókkos, j’avais choisi un tableau de Bacon, un portrait de George Dyer, et tenté de rendre compte de la déformation opérée sur la toile.Yánnis Kókkos a aimé cette proposition, et alors que je ne me sentais pas à ma place dans le groupe, il a ainsi validé ma présence à l’école, grâce à Bacon. J’avais à ma petite échelle une histoire personnelle avec Francis Bacon…
M’en rendre compte m’a beaucoup aidé à comprendre qu’il suffisait d’accepter le hasard de ce nouveau rendez-vous avec lui.

 

Que vous apporte de faire l’acteur ?

 

Jouer est important car cela me relie aux raisons qui, des années plus tard, ont fait de moi un directeur de théâtre. J’ai commencé par vouloir être acteur. C’est depuis cette place d’acteur passé à la mise en scène que je me suis retrouvé à diriger un lieu. Devenir directeur d’un théâtre n’est pas un but en soi, ce n’est jamais qu’une passion qui se déplie. L’important, c’est d’avoir toujours accès à la source de ce qui naît sur le plateau. Je trouve très intéressant de jouer pendant le Festival, c’est une façon de rappeler d’où je viens et d’où je fais les choses. Grand Palais est un projet que je trouve passionnant et j’y suis à la disposition de Pascal Kirsch, des auteurs Julien Gaillard, Frédéric Vossier, et de l’histoire de Francis Bacon et George Dyer. Exister lors du Festival en tant qu’acteur est forcément une prise de risque, mais elle a plus de sens pour moi que de me présenter comme le directeur du Festival. Une manière de partager avec les autres artistes un territoire qui nous est commun.

 

— Propos recueillis par Patrick Sourd

 

 

 

Photo © Louise Quignon

Le Magazine du TNB

 

Entretien réalisé pour le supplément des Inrocks consacré au Festival TNB 2023, avec Arthur Nauzyciel, metteur en scène, comédien et directeur du TNB.

FESTIVAL TNB X LES INROCKS

ENTRETIEN AVEC ARTHUR NAUZYCIEL

Publié le 23/10/2023

 

Entretien réalisé pour le supplément des Inrocks consacré au Festival TNB 2023, avec Arthur Nauzyciel, metteur en scène, comédien et directeur du TNB.

“J’ai commencé par vouloir être acteur”

Arthur Nauzyciel revendique un festival de transmissions en recentrant l’événement sur le travail du plateau où il prend sa part de risque en tant qu’acteur.

 

Quelles sont les ambitions de cette septième édition du Festival TNB ?

 

Arthur Nauzyciel — Garder le cap. C’est très important pour nous d’avoir dans la saison ce moment festif, qui existe depuis l’origine de la Maison de la Culture, et que j’ai lancé, depuis 2017, sous ce nouveau format. Le Festival est un rendez-vous attendu. Un temps privilégié, où les gens se retrouvent dans une énergie particulière et un temps singulier pour partager ensemble un autre rapport aux spectacles vivants. Construire ce projet avec des structures partenaires participe aussi d’une incitation au nomadisme du public à travers une offre dispersée sur l’ensemble du territoire culturel de la ville de Rennes et sa métropole.

 

Quels liens tissez-vous entre le Festival et votre programmation de la saison ?

 

On ne fait pas de différence entre les artistes présentés dans la saison et ceux invités au Festival. Pour nous, il s’agit d’un arrêt sur image qui cristallise la variété des sujets qu’on aborde au long de l’année. Comme spectateur, je pense qu’on se construit à travers la comparaison des formes et des esthétiques. On pense le Festival comme un choc d’émotions qui se réclame d’une confrontation d’univers. Les thèmes sont très divers, ils vont des arts visuels à des hommages à des figures tutélaires, tout autant qu’ils traitent de l’histoire contemporaine et de notre engagement envers le handicap. C’est parfois en découvrant des spectacles aux thématiques similaires et en s’apercevant qu’elles peuvent être traitées de manière très différente qu’on construit son regard.

 

Vous mettez l’accent sur l’idée de transmission.

 

La question de la transmission s’inscrit autant dans les sujets traités au plateau que dans le fait que le Festival soit devenu un lieu de formation à travers une série de master class, de workshops et de rencontres. Autant de propositions ouvertes au public, à de jeunes artistes français et étrangers et à des
étudiants. Il me semble important que le Festival leur permette de rencontrer les artistes en offrant la possibilité d’échanger avec eux et de les découvrir au travail.

 

Dans Grand Palais et sous la direction de Pascal Kirsch, vous interprétez le rôle du peintre Francis Bacon.

 

Pour incarner un artiste, Pascal Kirsch cherchait un interprète qui soit aussi un créateur. Il avait découvert mon travail avec La Mouette de Tchekhov que j’avais présentée au Festival d’Avignon dans la Cour d’honneur. J’aimais ses mises en scène, et traiter du sujet des rapports entre Bacon et son amant George Dyer est un pari passionnant. 

 

Les hasards de la vie vous ont déjà amené à croiser Bacon.

 

C’est un jardin secret qui remonte à mes 17 ans. J’avais profité d’un voyage à Londres pour visiter la Tate Modern. La découverte d’une exposition qui lui était alors consacrée fut un véritable choc. Avisant un petit monsieur assis sur une chaise, que je pris pour un gardien, je lui demande de nous aider dans notre visite, ce qu’il accepte avec une grande gentillesse. Le lendemain, je tombe sur une photo du peintre dans le journal et m’aperçois que c’était Francis Bacon qui nous avait servi de guide ! En travaillant sur ce projet, je me suis souvenu d’un autre moment intime lié à Francis Bacon alors que j’étais élève comédien à l’École de Chaillot d’Antoine Vitez. Lors d’un exercice sur la peinture proposé par le scénographe Yánnis Kókkos, j’avais choisi un tableau de Bacon, un portrait de George Dyer, et tenté de rendre compte de la déformation opérée sur la toile.Yánnis Kókkos a aimé cette proposition, et alors que je ne me sentais pas à ma place dans le groupe, il a ainsi validé ma présence à l’école, grâce à Bacon. J’avais à ma petite échelle une histoire personnelle avec Francis Bacon…
M’en rendre compte m’a beaucoup aidé à comprendre qu’il suffisait d’accepter le hasard de ce nouveau rendez-vous avec lui.

 

Que vous apporte de faire l’acteur ?

 

Jouer est important car cela me relie aux raisons qui, des années plus tard, ont fait de moi un directeur de théâtre. J’ai commencé par vouloir être acteur. C’est depuis cette place d’acteur passé à la mise en scène que je me suis retrouvé à diriger un lieu. Devenir directeur d’un théâtre n’est pas un but en soi, ce n’est jamais qu’une passion qui se déplie. L’important, c’est d’avoir toujours accès à la source de ce qui naît sur le plateau. Je trouve très intéressant de jouer pendant le Festival, c’est une façon de rappeler d’où je viens et d’où je fais les choses. Grand Palais est un projet que je trouve passionnant et j’y suis à la disposition de Pascal Kirsch, des auteurs Julien Gaillard, Frédéric Vossier, et de l’histoire de Francis Bacon et George Dyer. Exister lors du Festival en tant qu’acteur est forcément une prise de risque, mais elle a plus de sens pour moi que de me présenter comme le directeur du Festival. Une manière de partager avec les autres artistes un territoire qui nous est commun.

 

— Propos recueillis par Patrick Sourd

 

 

 

Photo © Louise Quignon

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